Phaplu se situe à 250 km à l'est de Katmandou, tout au bout de l'une des rares routes goudronnées du Népal. Avant de partir, nous faisons escale à Bhaktapur puis allons passer la nuit au sommet de la colline de Nagarkot, gratifiés d'un magnifique lever du jour avec vue panoramique sur la capitale d'un côté et les cimes enneigées du Langtang de l'autre. Tandis que Florent souhaite faire une descente à vélo de ce spot reconnu du Népal, je prends la route très tôt dans l'espoir d'arriver avant la nuit.


Mal m'en a pris. Après 5 km, en suivant les recommandations de Google Maps, je bifurque à gauche sur une route qui descend dans la forêt. Très vite elle se transforme en chemin, de plus en plus défoncé, et je me perd, avec l'impossibilité de faire demi-tour. S'ensuivent 4 heure de galère, de chemins boueux, montées infernales, énormes trous et ornières profondes... Après moult manœuvres délicates où mon sang froid est mis à rude épreuve, et au prix de mon parechoc et de ma plaque de protection sous moteur, je fini par enfin retrouver le bitume. En retournant à mon point de départ je croise Florent remontant la pente en pédalant.


Cet intermède tout-terrain n'est que le début des ennuis. Après quelques kilomètres sur la route bondée de bus, de jeeps et de motos, un bouchon. C'est pire qu'un 15 août sur l'autoroute du Soleil : des milliers d'habitants de Katmandou rentrent dans leurs contrées natales pour fêter Dashain en famille. La journée sera harassante, et à la nuit tombée nous devrons nous arrêter en n'ayant pas fait la moitié du chemin. Le lendemain nous partons à l'aube. Une voiture me fait des appels de phare. La tête dans le cul, je roule à droite ! Heureusement la circulation est meilleure. Quelques passages pas évidents à négocier avec nos deux roues motrices, et des centaines de virages sur une petite route de montagne, et nous arrivons a Phaplu.


Alors que nous sommes à la recherche d'un emplacement où garer les camion, un léopard surgit furtivement de la forêt pour traverser la route d'un grand bond, quelques mètres devant nous. Nous trouvons finalement le seul terrain plat du village, une petite clairière où des locaux stockent du bois. Je reçois un coup de téléphone de Tangi. Toujours à cause des fêtes, il ne trouve pas de transport pour venir. Il m'explique donc où aller rouler, et me met en garde contre les ours. Nous sommes bien dans l'Himalaya !


Nous consacrons les jours suivant au VTT. Chaque matin, nous grimpons les 900 m de dénivelé jusqu'au sommet de la colline surplombant Phaplu, puis redescendons par l'un des multiples sentiers serpentant dans la forêt. Puis, Tangi étant toujours bloqué à Katmandou, nous partons en randonnée seuls vers Pikey Peak. Nous chargeons les sacs à dos à bloc car il nous faudra 3 jours pour effectuer la boucle.


La première étape est une bonne mise en jambe. Nous remontons la route sur une petite quarantaine de kilomètres jusqu'au hameau de Dhap. C'est plus agréable en vélo qu'en voiture, et nous arrivons juste à l'heure pour le déjeuner dans un petit lodge où nous passerons la nuit. Le lendemain, l'objectif est de rejoindre le pied du sommet. Pour celà nous roulons sur un chemin de crête, tantôt dans des forêts de rhododendrons géants, tantôt dans des prairies, nous permettant d'entrevoir au loin les premières cimes enneigées. La matinée se terminera par un sentier escarpé où il faudra porter le vélo sur le dos pendant une demi-heure avant d'atteindre le "camp de base" de Pikey Peak, en fait une petite bergerie aménagée en lodge. La chambre est spartiate : des planches en bois font office de lits, les couvertures sont humides et les fenêtres ne sont que des bâches en plastique battant au gré du vent. La nuit est glaciale, et à celà s'ajoute les ronflements de Florent. Après mes lancers de savates pour tenter de le réveiller, nous déciderons de ne dorénavant plus dormir dans la même chambre.


Nous décollons à l'aube afin d'assister au lever de soleil au sommet. Mais d'abord, nouveau portage sur 300 m de dénivelé. Même si la pente est raide et que mes doigts gèlent, celà passe très bien car je sais qu'ensuite il n'y a plus qu'une longue descente. En haut, à plus de 4000 m, le panorama est extraordinaire. D'un côté la chaîne de l'Himalaya et ses majestueux 8000 : du Dhaulagiri à l'ouest jusqu'au Kanchenjunga à l'est, avec au centre, bien sûr, l'Everest. De l'autre côté, une mer de nuages à l'infini. Face à ce spectacle, nous prenons notre petit déjeuner, chapattis et fromage de yak, avant d'enfourcher nos vélos.


Nous commençons gentiment la descente sur l'herbe de la crête, en slalomant entre les rochers, avant de nous engager sur un sentier caillouteux à flanc de montagne. Dans mon élan d'enthousiasme, je ne fais guère attention au placement de ma roue avant. Cette dernière projète un caillou sur mon dérailleur, faisant passer la chape dans la roue. Bilan : dérailleur tordu et 3 rayons de cassés. Je rejoins Florent 200 mètres plus bas, à pied, abattu. Je n'ai pas du tout envie de marcher jusqu'en bas, et je n'ai pas trimballer mon VTT sur des milliers de kilomètres pour en arriver là. La roue n'étant pas trop voilée, je ligature les morceaux de rayons cassés avec du sparadrap, et décide de continuer. Et j'ai bien fait. L'interminable descente de 1800 m verticaux est fantastique : des passages techniques sur des racines ou plus roulant entre les arbres, des sauts, des épingles... J'arrive en bas avec un grand sourire, entier (le vélo aussi).

L'après-midi, nous retrouvons Tangi qui a finalement pu trouver une jeep. Nous roulons ensemble le temps de monter à un monastère bouddhique et de redescendre, avant de le quitter, ses vacances étant déjà terminées. Nous roulerons encore quelques jours autour de Phaplu, découvrant des sentiers de plus en plus amusants, avant de poser nos vélos pour notre prochaine aventure.


Difficile de prendre des photos en faisant du VTT, alors je vous propose cette vidéo de Tangi à Pikey Peak : https://youtu.be/no-9Br9YAw8


Valérien